Les insectes souffrent (urbanisation, pesticides…) et vont souffrir davantage avec les dérèglements climatiques. Mais on peut les aider en repensant nos jardins et rebords de fenêtre, soutiennent 70 scientifiques dont 3 de l’UCLouvain.
Quentin Colette
L’Avenir – Publié le 18-11-2022 à 14h27 – Mis à jour le 18-11-2022 à 14h28
Une pelouse coupée à ras du sol ? Certains trouvent ça joli, mais ça ne favorise pas la présence des insectes ni la biodiversité. Alors place à un jardin plus rock and roll !
« Un jardin respectueux des insectes est un beau jardin, mais un beau jardin n’est pas nécessairement un jardin favorable aux insectes. » C’est à lire dans une synthèse écrite par une septantaine de scientifiques, dont trois chercheurs de l’UCLouvain, pour alerter sur la disparition des insectes des suites du dérèglement climatique et parue dans le journal Ecological Monographs.
Et Kévin Tougeron, chercheur à l’Earth and Life Institute de l’UCLouvain, un des coauteurs de la synthèse que nous avons joint, d’ajouter : « Il faut se mettre à la place des insectes : la plupart des jardins sont des déserts pour eux. C’est un calvaire car il n’y a rien de bien pour eux dedans, ni ressources, ni abris. »
D’autant que si les insectes souffrent déjà de l’urbanisation et des pesticides notamment, les changements climatiques les frappent aussi. Or, environ 80% des plantes cultivées dépendent des insectes pour se développer.
Place à un jardin plus rock and roll
Alors si les mesures qui ont le plus d’impact sont celles qui devraient être mises en place par les gouvernements, reconnaissent les chercheurs, les décisions prises par chaque individu « peuvent encore faire une grande différence pour la conservation des insectes », écrivent-ils.
Nous pouvons donc tous agir pour aider les insectes.
Ainsi, « les zones étanches d’un jardin, ainsi que les pelouses traditionnellement bien entretenues, doivent être réduites au minimum », lit-on dans la synthèse. Fini de vouloir une pelouse coupée à ras du sol, place à un jardin plus rock and roll.
Comment ? En laissant l’herbe pousser dans certaines zones ; en favorisant la diversité des plantes et des fleurs ; en laissant une zone avec du bois mort ou encore en créant une zone plus rocailleuse, par exemple.
Laisser les feuilles mortes sur la pelouse
De même, Kévin Tougeron invite à ne pas ramasser les feuilles tombées sur nos pelouses. « Les arbres ont puisé de l’énergie dans le sol pour les faire pousser. Après être tombées, ces feuilles vont être transformées par des insectes en humus qui va nourrir le sol. C’est un cercle vertueux. »
C’est plus complexe à mettre en œuvre, mais aménager un petit étang, havre de fraîcheur, peut aussi être intéressant. Planter des buissons et des arbres constitue aussi une stratégie payante pour les insectes.
À l’inverse, il faut éviter tout usage des pesticides.
Pour résumer, « l’idée est de créer des refuges microclimatiques pour les insectes afin qu’ils puissent y trouver un abri contre la chaleur ou l’humidité ou simplement se reposer mais aussi de la nourriture« , commente le chercheur de l’UCLouvain.
Et si on craint la présence de frelons ou de guêpes, il souligne qu’on peut éloigner des habitations les sources alimentaires de ces insectes. « En outre, plus on augmente la diversité des zones et des plantes dans le jardin, au plus on attire une diversité d’insectes mais aussi d’espèces qui s’en nourrissent comme les oiseaux. Si la diversité est présente, une espèce ne dominera pas et tout se régulera par soi-même. »
Un rebord de fenêtre suffit
Mais que faire, si nous n’avons pas de jardin ? Pas de souci : un rebord de fenêtre suffit. « Une jardinière avec plusieurs types de plantes, et c’est déjà gagné, on verra un effet positif sur les insectes, surtout si tout le voisinage s’y met aussi. On peut aussi installer un abri à insectes bien utile contre la pluie, la chaleur ou le froid. »